En France, on entend de plus en plus parler de “proche aidant” ou “d’aidant familial”. Ce statut ne fait qu’officialiser, pour beaucoup, l’aide naturelle et spontanée apportée à un membre de sa famille en perte d’autonomie ou en situation de handicap. Selon le gouvernement, 11 millions d’aidants étaient comptabilisés en France, rien qu’en 2021, soit 1 Français sur 6. Dans 66% des cas, l’aidant est une femme, d’environ 72 ans en moyenne. La perte d’autonomie d’un proche reste l’élément déclencheur de cette volonté d’aider plus son parent. Se qualifier de proche aidant, prendre cette responsabilité, demande donc de se poser quelques questions au préalable, pour entrevoir les démarches administratives adaptées.

Etre proche aidant, ça signifie quoi en France ?

La loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement indique que le proche aidant peut être un conjoint, un partenaire de PACS, un parent (44% des cas), un enfant, une personne très proche du senior, hors de son cercle familial. Cette personne, comme son nom l’indique, aide la personne âgée dans son quotidien, régulièrement et parfois même quotidiennement. L’Etat indique que 93% des aidants se rendent au moins une fois par semaine chez leur proche en perte d’autonomie. Et 73% des proches aidants y vont même plusieurs fois par semaine.

Etre proche aidant, consiste à aider, soutenir, accompagner une personne âgée dans son quotidien. Cette aide vise aussi à repousser l’emménagement en maison de retraite ou en EHPAD, à l’heure où la population vieillit de plus en plus et où les établissements sont remplis.

Le gouvernement, dans son guide du proche aidant, révèle quelques chiffres autour des aides qu’apportent les proches à leur aîné :

  • 81% disent faire des courses, entretenir l’habitation de la personne âgée ;
  • 68% des aidants accompagnent leur proche pour des sorties à l’extérieur ;
  • 66% s’occupent de l’organisation de la gestion du quotidien ;
  • 55% interviennent pour une aide plus personnelle (soins de santé, toilette quotidienne, etc).

Dois-je obligatoirement être reconnu officiellement comme proche aidant ?

Le statut de proche aidant n’est en aucun cas un statut professionnel, mais il confère toutefois quelques droits qu’il est utile de connaître.

Certains peuvent estimer qu’être reconnu proche aidant ne change rien, puisqu’il s’agit d’un acte d’amour, de bienveillance que beaucoup réalisent de façon spontanée. Il s’agit alors d’épauler un parent, face à l’âge qui avance, la perte d’autonomie qui prend du terrain. Une présence “normale” auprès des gens chéris.

Toutefois, au regard du besoin grandissant des aidants à être formés, reconnus et aidés par le gouvernement, il est tout à fait possible de rendre ce statut officiel auprès de l’administration française. Ca n’est pas obligatoire mais permet à l’aidant de bénéficier d’aides et de droits.

Ainsi, il convient d’envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception au conseil départemental. Vous ou la personne âgée (qui indiquera que vous êtes son aidant) pouvez effectuer cette demande. Celle-ci doit comprendre :

  • L’attestation sur l’honneur de votre statut d’aidant familial ;
  • Le lien qui vous unit à la personne âgée ;
  • Les raisons qui vous poussent à prendre ce statut (perte d’autonomie, maladie, handicap, autres…)
  • Les exemples du soutien apporté à la personne âgée ;
  • Le temps consacré à l’aide de votre proche ;
  • L’explication de votre situation personnelle (salarié, retraité, parent, éloignement géographique…) ;
  • Les documents justificatifs faisant état de l’intervention indispensable d’un proche ou d’un professionnel auprès du senior, vos aménagements de temps de travail obtenus avec votre employeur ;
  • Une pièce d’identité.

Une fois le statut d’aidant validé par l’administration française, vous pouvez dès lors bénéficier des aides dédiées, des accompagnements prévus, mais aussi faire valoir vos droits en entreprise. Fait non négligeable, être reconnu officiellement comme aidant vous permet d’être tenu informé et concerté dans la prise en charge de votre proche.

Quel est mon degré de responsabilité en tant qu’aidant ?

Etre proche aidant, surtout lorsque vous n’êtes pas l’enfant ou le conjoint de la personne âgée, vous confère quelques responsabilités de l’ordre du juridique.

Nous rappelons bien entendu que les membres de la famille proche d’une personne âgée sont toujours consultés pour la prise de décisions la concernant, surtout lorsqu’elle n’est plus elle-même en mesure de le faire.

Etre proche aidant, c’est donc être une “personne de confiance“. Cela signifie, grâce à une simple attestation par écrit sur papier libre, que la personne âgée vous donne le droit d’être présent lors de ses rendez-vous médicaux, de l’accompagner dans ses démarches administratives, d’indiquer aux soignants les dernières volontés en cas d’impossibilité à le faire elle-même.

De plus, le proche aidant est officiellement reconnu par le Code de la santé publique (articles L1111-11 à 12; R1111-17 à 20) comme la personne apte à être responsable des directives anticipées de fin de vie en cas de dégradation de l’état de santé de la personne âgée. Si elle le souhaite, cette dernière peut même établir à l’avance, son envie que son proche aidant, avec son avis favorable, devienne mandataire d’un «mandat de protection future». Dans ce cas de figure, l’aidant devra tout mettre en place pour garantir les intérêts de son parent en cas de perte d’autonomie d’incapacité mentale et physique à prendre des décisions dans son propre intérêt.

Quels sont mes droits de proche aidant si je travaille dans la Fonction publique ?

Officiellement reconnus comme aidants, ces personnes peuvent dès lors bénéficier d’aides au quotidien pour leur permettre de prendre soin de leur proche âgé.

Les aidants encore actifs peuvent prétendre à des congés spéciaux :

  • Le congé de solidarité familial : pour accompagner un proche (âgé ou non) en fin de vie. Ce congé est généralement mis à disposition des agents de la Fonction publique en France. Il perçoit une allocation le temps du congé.
  • Le congé proche aidant : ici, l’aidant, agent de la Fonction publique, peut moduler son temps de travail en passant à temps partiel ou en cessant temporairement de travailler . Sous réserve que l’ensemble des documents justificatifs soient transmis, cette demande ne peut pas être refusée. Ici l’aidant n’est pas rémunéré durant ses absences. Toutefois, il peut prétendre à l’AJPA, proposée par la CAF.

Quelles sont les aides disponibles ?

Plusieurs aides permettent de soutenir financièrement les proches aidants, lorsqu’ils mettent leur carrière entre parenthèse, enchaînent les allers retours pour aider leur aîné, etc.

A cela s’ajoutent les aides dont peuvent bénéficier les proches âgés ! Ainsi, il est utile de les connaître pour limiter les dépenses et investissements mais aussi alléger le soutien financier des proches lorsque la personne âgée n’est pas en mesure de payer elle-même.

  • L’APA : l’Allocation Personnalisée d’Autonomie. Cette aide sert les intérêts d’une personne âgée en perte totale ou partielle d’autonomie. Elle vise à couvrir les frais d’aménagement permettant de rester à son domicile ou l’hébergement en établissement adapté.
  • La Carte Mobilité Inclusion : cette aide vise déjà à rendre les transports en commun plus accessibles aux personnes âgées en perte d’autonomie pour limiter l’isolement. Puis, elle permet d’avoir des places prioritaires dans les transports, dans les salles d’attente, etc. Cette carte couvre également le proche aidant. Ensemble, ils profitent d’avantages fiscaux, mais aussi commerciaux sur les tarifs des trajets.

Comment faire, si je dois m’absenter ou ai besoin de prendre des vacances ?

Comme tout un chacun, proche aidant ou non, le besoin de prendre des congés, de partir en vacances, de faire une pause est légitime.

Prendre soin quotidiennement d’un proche âgé en perte d’autonomie demande un investissement financier, physique, moral, émotionnel, sans précédent.

Le proche aidant, ou proche d’une manière générale, peut hésiter à l’idée de partir plusieurs jours voire plusieurs semaines en vacances de peur d’abandonner son parent âgé. Pourtant, il existe des aides, des solutions adaptées !

Lorsque vous êtes plusieurs dans la famille à pouvoir prendre soin du proche âgé, il est sans doute possible de prendre le relai des uns et des autres pendant les absences. Mais l’état prévoit des solutions pour les proches aidants “officiels”.

  • Le droit au répit : ce droit, comme son nom l’indique, permet à l’aidant de faire une pause dans l’accompagnement de son parent. Ainsi, si le proche âgé perçoit l’APA, une enveloppe de 500 € est mise à sa disposition pour qu’en cas d’absence de son aidant, il puisse être pris en charge dans un hébergement temporaire, ou qu’une aide à domicile vienne chez lui plus souvent le temps de l’absence.
  • L’accueil de jour est une solution envisageable pour les personnes âgées et leurs aidants : une demi-journée voire plus par semaine, le senior peut être accueilli en EHPAD ou en hôpital gériatrique pour y suivre des activités, ou bénéficier de soins adaptés à sa pathologie. Ainsi, cela a le mérite de soulager quelques heures par semaine les proches aidants.
  • L’hébergement temporaire en établissement de soins : si vous partez en vacances et ne pouvez pas laisser votre proche seul à la maison, alors pensez à l’hébergement temporaire en EHPAD. Pendant le temps nécessaire, vous pourrez alors faire une pause en garantissant la sécurité et les soins apportés à l’aidé.
  • L’accueil familial : si votre proche âgé ne souhaite pas aller en EHPAD pendant quelques jours ou quelques semaines, et que sa condition physique le lui permet, pensez à l’accueil familial. Il s’agit de familles agréées à recevoir chez elle des personnes âgées en perte d’autonomie temporairement.
  • Les séjours de vacances : pourquoi ne pas partir tous ensemble en vacances, qui plus est dans un cadre adapté à la personne âgée ? Ce dispositif est rendu possible par des associations qui ont à cœur de rendre les vacances accessibles à tous. Seul ou avec ses proches, l’aidé peut alors s’échapper un moment de son quotidien. Il existe en France le réseau des villages « vacances répit familles » (VRF) ou aidé et aidant peuvent profiter de moments ensemble ou vaquer à leurs occupations.

Est-ce que je dois être formé pour être aidant ?

Non, ce n’est pas obligatoire. Etre aidant correspond aux tâches quotidiennes que l’on ferait naturellement pour son proche, en toutes circonstances.

Comme on accompagne papy et mamie faire leurs courses, on fera le nécessaire pour donner un coup de propre à leur logement. Ce sont les gestes du quotidien qu’ils ne peuvent plus faire eux-mêmes ou qui les mettraient en danger s’ils les faisaient. Etre aidant, c’est aussi aider son proche à lire des documents, à les comprendre, à utiliser les nouvelles technologies.

Mais ce statut confère également des responsabilités, demande aussi de connaître ses droits et ceux de l’aidé, comprendre à quels moments il faut intervenir, ce qu’est la perte d’autonomie, etc.

La formation est alors proposée pour épauler les aidants, mieux les informer, pour qu’ils comprennent les tenants et les aboutissants de la gestion d’une personne âgée en perte d’autonomie. Ce chamboulement dans la vie de tous les jours, lorsqu’une présence quotidienne est essentielle, cette charge mentale supplémentaire, l’implication émotionnelle, personnelle qui en découlent doivent être mis en lumière. Comment continuer de profiter de son proche tout en l’aidant ? Qui sont les professionnels susceptibles de soutenir la personne âgée ? Comment lui faire accepter son aide au quotidien ? Quelles sont les limites, les contraintes pour l’aidant ? Comment gérer l’arrivée d’une maladie, la fin de vie ?

Autant de questionnements auxquels l’Etat tente de répondre grâce à l’Association française des aidants, qui propose depuis plusieurs
années des formations gratuites partout en France.

Etre aidant, c’est avant tout un lien d’amour unique entre un proche et une personne âgée. Officialiser ce statut au yeux du gouvernement permet notamment d’être soutenu financièrement, et moralement dans ce combat pour la vie. S’il s’agit de gestes naturels du quotidien, s’il est question de soutenir son proche âgé, le statut d’aidant n’en demeure pas moins difficile à l’heure où les personnes vivent de plus en plus longtemps, et où les aidants travaillent encore pour beaucoup. Bien que la question ne se pose pas d’aider ou non son proche dans le besoin, être reconnu comme l’aidant officiel d’une personne âgée demande toutefois la prise en compte de certains éléments.

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