Actuellement en France, il est possible de refuser un traitement en fin de vie. En effet, la loi du 4 mars 2002, dite loi Kouchner, a établi ce droit, et les lois du 22 avril 2005 (loi Leonetti) et du 2 février 2016 (loi Claeys-Leonetti) sont venues l’appuyer. Un médecin est tenu de respecter la décision de son patient, après l’avoir informé des conséquences de son choix. Des évolutions législatives concernant l’aide à mourir sont cependant en cours de discussion et pourraient modifier le cadre légal actuel. Explications.
La fin de vie, un épisode de vie à part entière
La fin de vie est un épisode de vie qu’il convient de penser et de préparer en amont autant que possible. Cette période soulève de nombreux enjeux, à la fois :
- Médicaux: nécessité d’assurer des soins palliatifs adaptés pour garantir le confort du patient, prise de décision thérapeutique de manière à éviter l’obstination déraisonnable…
- Ethiques: prise en compte des souhaits exprimés par les patients via des directives anticipées ou la parole d’une personne de confiance, équilibre à trouver entre l’acharnement thérapeutique et l’accompagnement vers une fin digne…
- Psychologiques: accompagnement émotionnel du patient et de ses proches, prévention de la détresse morale…
- Sociaux: reconnaissance et soutien aux familles et aux aidants, prise en charge de qualité quel que soit le milieu social ou la zone géographique…
- Juridiques: évolution de la législation sur la fin de vie, cadre variable en fonction des pays, protection des professionnels de santé…
Le refus de soin en fin de vie : est-ce légal ?
Selon le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie, la loi de 2002, première loi relative aux droits des malades, précise clairement que le refus de traitement est un droit en France. La loi de 2005, première loi spécifique à la fin de vie, introduit de son côté l’interdiction de l’obstination déraisonnable. Dans les faits, tout patient est en droit de considérer qu’un traitement constitue pour lui une obstination déraisonnable et peut le refuser, même si ce refus risque d’entraîner des conséquences vitales. Il a alors le droit de bénéficier d’un accompagnement palliatif. De plus, cette loi rend possible la rédaction de directives anticipées, permettent aux patients d’exprimer leurs volontés quant aux décisions à prendre pour leur fin de vie dans le cas où ils ne pourraient plus le faire eux-mêmes.
En février 2016, une autre loi est venue créer de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (revalorisation des directives anticipées et du rôle de la personne de confiance, possibilité pour le patient de demander une sédation profonde et continue jusqu’à son décès sous conditions très strictes…).
Un projet de loi qui pourrait faire évoluer la législation sur la fin de vie
Par ailleurs, un nouveau projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie a été présenté au printemps 2024. Dans sa version initiale, ce projet visait à créer une « aide active à mourir » pour les personnes atteintes d’une maladie grave et incurable, et subissant des souffrances insupportables. L’accès à cette aide serait évidemment très encadré, soumis à une procédure stricte et à de nombreuses conditions (être majeur, résider en France, pouvoir exprimer une demande claire et éclairée, être atteint d’une pathologie grave et incurable avec un pronostic vital engagé…). A côté de cela, ce projet de loi prévoyait également un plan décennal pour renforcer les soins palliatifs, avec un investissement supplémentaire de 1,1 milliard d’euros sur 10 ans.
Néanmoins, les discussions autour de ce projet ont été interrompues en juin 2024 suite à la dissolution de l’Assemblée nationale. Les dialogues devaient reprendre au début de 2025 mais le Premier ministre François Bayrou a récemment exprimé le souhait de scinder le projet de loi en deux avec un texte sur les soins palliatifs et un autre sur l’aide à mourir. Le Parlement devrait donc débattre de deux textes sur la fin de vie « probablement en mai » selon la porte-parole du gouvernement Sophie Primas.
L’aide à mourir en fin de vie : un sujet très sensible et source de clivage
Le sujet est dans tous les cas des plus sensibles. Si divers sondages décrivent les Français comme majoritairement favorables à la légalisation d’une forme d’aide à mourir, le monde médical reste divisé, tout comme les représentants des religions. Si certains y voient un sujet essentiel de liberté et de dignité, d’autres craignent une évolution dangereuse éthiquement.
En mars 2024, lors d’une interview accordés à Libération et La Croix, le Président de la République Emmanuel Macron déclarait : « Il y aura des oppositions. Mais ce texte est le fruit d’un travail et d’un cheminement collectif comme rarement il y en a eu. J’espère qu’en honnêteté, ceux qui n’en partagent pas la philosophie reconnaîtront que c’est un texte humaniste, qui place la dignité humaine au cœur de son projet. C’est ça qui m’importe ». A l’époque, le chef de l’Etat s’était employé à peser chaque mot et avait refusé d’employer les termes d’euthanasie ou de suicide assisté.
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