
Depuis 2017, la ville de Paris a repris la main sur les principales compétences funéraires, jusque-là exercées par la préfecture de police. Une réforme peu visible pour la majorité des habitants… jusqu’à ce qu’un décès vous confronte aux démarches, souvent complexes, liées à l’organisation des obsèques. Cette évolution réglementaire, pourtant capitale, ambitionne une gestion plus lisible, plus rapide, plus proche de vos besoins. Alors, le transfert des compétences funéraires à Paris est-il réellement synonyme d’un meilleur service pour les familles ? Permet-il une simplification tangible des procédures ? Et qu’en est-il de la transparence et de l’éthique dans un secteur encore largement méconnu ? Décryptage d’une réforme qui vous concerne peut-être plus que vous ne le pensez.
Paris récupère les rênes : pourquoi ce changement de gouvernance ?
Jusqu’au 1er juillet 2017, l’organisation funéraire à Paris faisait figure d’exception. Contrairement au reste du territoire, où ces missions relèvent des maires, la capitale confiait une partie importante de la gestion funéraire à la préfecture de police. C’est la loi du 28 février 2017 qui a mis fin à ce régime dérogatoire en transfert ne s’est pas contenté de redistribuer les cartes sur le plan institutionnel. Il a entraîné une réorganisation de fond : désormais, les maires d’arrondissement peuvent recevoir les déclarations relatives aux soins de conservation ou au transport de corps, tandis que la direction des affaires funéraires de la ville instruit les demandes plus techniques, comme les autorisations d’exhumation ou de dépôt temporaire.
Cette réforme a également rétabli une forme de cohérence administrative. En centralisant l’ensemble des missions au niveau municipal, Paris rejoint enfin le droit commun, dans une logique de proximité avec les usagers et de simplification des circuits de décision. Une orientation confirmée par la Cour des comptes, qui souligne dans son rapport de 2018 que « la clarification des rôles institutionnels améliore la réactivité des services et la lisibilité de l’action publique.
Des démarches administratives plus fluide… mais encore perfectibles
Pour les familles, l’intérêt de ce recentrage est clair : éviter la multiplication des interlocuteurs. Lorsqu’on doit faire face au décès d’un proche, être ballotté entre plusieurs administrations pour une simple autorisation de transport ou une demande de crémation peut vite tourner au casse-tête. En recentrant les procédures, la ville promet une plus grande réactivité. Le délai moyen de traitement d’une autorisation d’exhumation est aujourd’hui de 3 à 5 jours ouvrés, contre une dizaine auparavant lorsque la préfecture devait être sollicitée.
Dans les faits ce progrès est réel mais encore inégal. Certains arrondissements parisiens se montrent bien plus réactifs que d’autres, notamment en raison de la charge variable des services d’état civil. De plus, si la ville a entamé une numérisation progressive des démarches, toutes les procédures ne sont pas encore accessibles en ligne. Résultat ? Les familles doivent parfois jongler entre formulaire papier, mails, et rendez-vous en mairie. Pas toujours optimal dans un moment où l’on cherche avant tout un peu de clarté et de sérénité.
Enjeu de fond : mieux accompagner les évolutions des pratiques funéraires
La reprise en main par la ville intervient dans un contexte de mutation profonde du secteur funéraire. En dix ans, le recours à la crémation a presque doublé en France, passant à 47 % en 2022 selon la Fédération française de crémation. Paris n’échappe pas à cette tendance, ce qui implique de repenser les infrastructures existantes et d’anticiper la saturation de certains équipements, notamment les columbariums.
La mairie a ainsi lancé plusieurs chantiers : réaménagement des cimetières pour intégrer davantage d’espaces cinéraires, rénovation du crématorium du Père-Lachaise, et réflexion sur des dispositifs d’accueil plus respectueux de l’environnement car l’empreinte écologique des obsèques devient elle aussi un sujet : cercueils en carton, urnes biodégradables, réduction de l’usage du formol… Les pratiques funéraires se verdissent et Paris entend accompagner ce mouvement.
C’est aussi là que le pilotage local prend tout son sens. A travers une gouvernance de proximité, la ville peut adapter son offre aux attentes des usagers, mais aussi encadrer les opérateurs du secteur. Car si les obsèques restent un moment intime, elles n’échappent pas aux logiques commerciales et mieux réguler ce marché, c’est aussi protéger les familles des abus.
Plus de transparence dans un secteur encore trop opaque
Le transfert des compétences à la ville permet une meilleure supervision du marché funéraire parisien. Or, cette surveillance était nécessaire. A Paris, le coût des obsèques se trouve entre 3 140 euros et 7820 euros selon UFC-Que Choisir, les écarts tarifaires sont souvent pointés du doigt par les familles.
Désormais, la mairie peut exiger davantage de transparence et contrôler plus efficacement le respect de la législation par les entreprises de pompes funèbres, notamment en matière de devis obligatoires ou de respect des délais. Cette capacité d’action renforcée est un levier essentiel pour redonner confiance aux usagers.
Une réforme discrète mais profondément utile
Le transfert des compétences funéraires à la ville de Paris n’a peut-être pas fait les gros titres. Il n’en reste pas moins structurant pour la vie quotidienne des habitants, surtout dans ces moments de grande vulnérabilité que sont les décès. En centralisant les missions au sein de la mairie, la réforme améliore l’accès aux services, limite les démarches redondantes et amorce un mouvement de modernisation salutaire.
Bien sûr tout n’est pas parfait. Il reste des efforts à faire pour numériser les procédures, harmoniser les pratiques entre arrondissements et renforcer la transparence du secteur. Mais la dynamique est là, portée par une volonté politique claire : faire la gestion funéraire un service public à part entière, à la hauteur des attentes des familles parisiennes.
Et si ce changement ne se voit pas toujours, il se ressent. Au cœur d’un moment intime, complexe et profondément humain, le rôle de la collectivité est de vous soutenir, sans friction ni lourdeur. Paris semble désormais mieux armée pour remplir cette mission.
Sources :
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2018
https://www.resonance-funeraire.com/magazine/dossiers/44-dossiers/6905-la-cremation-en-france-evolutions-et-perspectives.html#:~:text=En%202010%2C%20on%20d%C3%A9nombre%203,47%20%25%20sur%20la%20m%C3%AAme%20p%C3%A9riode.
https://meilleures-pompes-funebres.com/actualites/une-mort-a-prix-reduits
(Crédit photo : iStock / Santiago Urquijo)